Blender est un logiciel libre de modélisation et de rendu 3D, qui n’a rien à envier à ses équivalents propriétaires 3DS Max, Maya et Cinema 4D. Muni de moteurs physiques simulant les solides, les solides mous et les liquides, la gestion des poils et des cheveux, les tissus et les particules, permettant l’animation d’objets complexes, intégrant même une solution de montage vidéo, Blender a prouvé sa qualité à travers les films de la fondation Blender, dont les derniers, Cosmos Landromat et Agent 327, sont de qualité professionnelle.
La version 2.79 vient de sortir et fournit un lot intéressant de nouveautés. L’occasion de parler de cartes graphiques et de PBR (physics based rendering, ou rendu orienté physique).
Amélioration de la prise en charge d’OpenCL
Cette qualité a un coût. Le temps passé par Cycles, le moteur de rendu de Blender, pour rendre une scène modérément complexe, peut facilement atteindre plusieurs dizaines de minutes, voire plusieurs heures sur des scènes très complexes. Le temps de rendu des animations, multiplié par 30 ou 60 images à la seconde, peut monter alors à des semaines ou des mois, même sur de grosses fermes de calcul.
L’artiste au travail passe souvent un temps non négligeable à attendre qu’une image veuille bien s’afficher. Heureusement, Blender propose depuis longtemps, en alternative au processeur, d’effectuer ce rendu sur processeur graphique, via CUDA ou OpenCL, avec des performances multipliées par cinq ou dix. La prise en charge de CUDA était bien meilleure en termes de performances et de fonctionnalités, mais OpenCL a rattrapé son retard dans la version 2.79. Nos cartes AMD peuvent donc maintenant afficher matériaux volumétriques et effets de fumée.
Le Principled Shader
Le « buzzword », dans l’industrie, c’est le « physics based rendering » (PBR), ou rendu orienté physique.
Jusqu’à récemment, un artiste concevait et ajustait ses matériaux pour les besoins de la scène. Cela veut dire que le matériau correspondant à la peau d’un personnage était ajusté différemment lors d’une scène de nuit et d’une scène de jour, par exemple. La réutilisation d’un matériau n’était pas possible, car son aspect dans un environnement différent, avec des conditions de luminosité différentes, n’était pas celui attendu.
L’augmentation des performances du matériel permet maintenant une autre approche, qui est de créer un matériau qui essaye de coller au plus près de la réalité physique, comme par exemple l’effet Fresnel, la conservation de l’énergie, la réflexion des matériaux diélectriques et métalliques, les matériaux translucides… Ce matériau peut alors être utilisé tel quel dans n’importe quelle scène et donner le rendu attendu.
Jusqu’à présent, Blender fournissait les outils de base qui permettaient à chacun de construire ses propres nuanceurs (shaders) PBR, mais pas de shader PBR clé en main. C’est maintenant chose faite, avec le Principled Shader, inspiré d’un shader développé par Disney pour ses équipes. Le shader est « principled » plutôt que purement physique, car il repose sur le principe qu’il est d’abord créé pour les artistes, et propose donc des contrôles fait pour eux plutôt que pour les scientifiques des matériaux (ce qui n’est pas si heureux pour l’indice de réfraction qui est bidouillé pour tenir entre 0 et 1).
Filmic blender
Une autre fonctionnalité très attendue est l’intégration de Filmic Blender, jusqu’ici fourni comme un correctif externe.
Blender, principalement pour des raisons historiques, avait jusqu’à présent une gestion limitée et souvent irréaliste de la gamme dynamique. Filmic Blender promet une bien meilleure gestion de la lumière dans les scènes très contrastées. Cela évite à l’artiste de devoir corriger son rendu en post‐processing, ou à bidouiller l’image en ajoutant de fausses sources de lumière.
Dans ce rendu de test, l’image du haut a été rendue avec Filmic, l’image du bas avec les couleurs classiques. On peut voir dans l’image du bas que la partie la plus éclairée sature complètement (on parle de « clipping ») et que les couleurs sont trop vives pour être réalistes. À l’opposé, Filmic a une bien meilleure gamme dynamique et les couleurs fortement éclairées prennent un ton plus pastel, ce qui est beaucoup plus proche de ce que ferait un appareil photo, par exemple.
Et blender 2.8 ?
La prochaine version de Blender fournira un nouveau moteur de rendu, appelée Eevee, qui tente d’obtenir une qualité proche du moteur Cycles, mais en temps réel. Ceci permettra aux artistes de travailler directement sur le rendu final plutôt que de procéder itérativement entre ajustement des paramètres et rendu.