Depuis que CentOS, devenue CentOS Stream n'est plus un clone de Red Hat Entreprise Linux (RHEL) (voir cette dépêche de 2020), d'autres projets ont émergé ou rappelé leur existence. Rocky Linux et Alma Linux sont les plus connus, de par leurs moyens, leurs originalités et le passé (glorieux !) de leurs créateurs. En plus ils ont tout fait pour qu'un rachat « à la CentOS » ne soit pas possible. Il y a d'autres clones, certains sur des niches, dont voici un panorama. Cette courte présentation se veut informative, pas exhaustive.
Privés de sources
Ce sont des clones à partir des sources. Les options de compilation utilisées par RedHat ne sont pas connues. Les distributions se veulent néanmoins compatibles à 100%, «bug-for-bug». Mais un problème de sources vient d'émerger : le 21 juin 2023, Red Hat a annoncé que CentOS Stream sera maintenant l'ossature de RHEL et sera désormais leur dépôt public unique de code source. Autrement dit sans licence RHEL on n'a plus accès direct et gratuit au code-source de RHEL. LWN s'est fait le relais des inquiétudes. Les réactions d'Alma Linux et Rocky Linux sont claires : il n'y aura pas de changement, le suivi des correctifs est assuré. Aucun impact pour l'instant.
Sommaire
Pourquoi autant de clones gratuits de Red Hat Entreprise Linux (RHEL) ? Bien au delà de tous les arguments sur le coût et le service rendu à la communauté, ou sur le plaisir à le faire, Gregory Kurtzer explique pourquoi c'est si important :
Linux is a community endeavor, and it is freely available. There are thousands of separate projects that are all built together in a Linux distribution, but the distribution is simply the culmination of these packages. While there is value in assembling it, it is still comprised exclusively of freely available software. For that reason, there always needs to be freely available options that are not controlled by corporate needs to ensure proper mitigation of inherent conflicts of interest.
. . . . Interview de Gregory Kurtzer sur le site The New Stack
Autrement dit, des milliers de projets séparés sont rassemblés pour fonctionner ensemble dans une distribution Linux, mais celle-ci n'en est que le point d'aboutissement. Certes ce travail d'assemblage a de la valeur, mais l'ensemble est toujours composé de logiciels librements disponibles. Pour cette raison, on a besoin d'alternatives non orientées selon les besoins d'une entreprise et librement disponibles pour assurer une dilution des conflits d'intérets.
Petit encart sécuritaire
Vous savez que les paquetages logiciels sont signés. Garantir la sécurité de cette procédure impose de faire un choix qui joue sur l'ouverture de la communauté : restreindre le droit de commit à une poignée de personnes ou batir une infrastructure permettant de l'étendre. Bref, sur quoi joue la confiance ?
Le mémo
Rocky Linux
Rocky Linux est entièrement bâti par une communauté menée par le fondateur de Centos, Gregory Kurtzer. Il s'était plus ou moins fait piquer le nom Centos autrefois par celui qui l'a plus tard revendu à Red Hat. Mais à quelque chose malheur est bon : le projet Rocky Linux est ficelé de façon à ne jamais échapper à la communauté. En plus, tous les processus de construction y sont documentés, de façon à pouvoir être repris sans repartir à zéro. La communauté qui s'est investie est nombreuse, rien à voir avec Centos qui regroupait une poignée de développeurs. Enfin, le financement est en partie assuré par le fondateur.
- Images pour bureau (six bureaux), serveur et cloud générique
- Architectures x86_64, ARM64 (aarch64), PPC64le, s390x
- Plusieurs saveurs disponibles pour avoir tous les paquets sur l'image
Alma Linux
AlmaLinux est financé par CloudLinux qui utilisait Centos et RHEL pour ses services, et qui proposait déjà la distribution CloudLinux OS (dérivée de Centos) à destination des hébergeurs web et datacenters. Après avoir choisi de bâtir la première version sans aide extérieure, le projet s'est doté d'une fondation et s'est ouvert à la communauté.
- Images pour bureau (quatre bureaux) et serveur, plusieurs cloud, plusieurs containers, plusieurs virtualiseurs, WSL
- Architectures x86_64, aarch64, ppc64le, s390x
Navy Linux
NavyLinux, la petite dernière démarrée en janvier 2021. Elle est 100% communautaire, appuyée sur une association américaine type 501. La communauté est encore petite et ouverte, composée d'utilisateurs de Centos pas élitistes pour un sou. Elle se veut «just like CentOS has been» et monte peu à peu en puissance.
- Images pour bureau Gnome, serveur et containeur docker
- Architecture x86-64
Springdale
Springdale (ex-PUIAS) existait bien avant Centos. C'est un projet conjoint des équipes informatiques de l'Université de Princeton et de l'Institute for Advanced Study. Si je me souviens bien les équipes n'ont eu qu'à traverser la rue pour se rejoindre. Leurs répertoires de paquets contient des logiciels utiles, certains dédiés au travail scientifique, d'autres plus courant.
- Image pour bureau Gnome
- Architecture x86_64
- Fournit plein de paquets supplémentaires
À l'heure où j'écris, le site de Springdale est cassé (il est basé sur Trac). En revanche les images et paquetages sont toujours disponibles.
VZLinux
VzLinux est bâti par Virtuozzo qui se sert de RHEL pour ses services. C'est une version serveur optimisée au maximum pour tirer parti des containeurs et des hyperviseurs. C'est la base d'OpenVZ depuis 20 ans. OpenVZ fournit des paquets pour l'intégrer à des outils d'administration pour le cloud.
- Image pour serveur, cloud, containers, hyperviseurs et WSL
- Architecture x86-64
Oracle Linux
Oracle Linux existe depuis 2006. Elle aurait pu suffire à remplacer Centos, pourtant elle est décriée, détestée, approchée avec d'infinies précautions parce que certains n'ont pas confiance, vu le goût d'Oracle pour les procès, les changements de licence et les coups plus ou moins tordus.
- Images pour bureau Gnome, serveur, cloud et containeurs
- Architectures x86_64 et Arm
EuroLinux
EuroLinux vient d'une entreprise polonaise depuis 2013. C'est, en gros, comme RHEL, mais moins cher pour les marchés d'Europe de l'Est. Elle n'est pas complètement identique à RHEL : la version standard contient certains logiciels supplémentaires dont l'installation et le support sont payants chez Red Hat et Oracle et l'interface de bureau est retravaillée pour moins dépayser les habitués de Windows.
- Images pour bureau Gnome et serveur
- Architectures x86_64 et Arm
Miracle Linux
D'origine japonaise, elle existe depuis RHEL 2.1. Pour ne pas dire de bêtises, parce que je ne lis pas le japonais, je vous renvoie vers sa page de Wikipédia en anglais.
- Image pour serveur
- Architectures x86_32 et x86_64 d'après Wikipedia
et d'autres peut-être ?
Distrowatch tient sa liste à jour !.