Ce nouveau RFC est situé à l'intersection du
groupe de travail IETF ippm et du plus récent
groupe lmap. Ce
dernier travaille pour les Large-Scale
Measurements of Broadband Performance, c'est-à-dire pour les
mesures objectives des performances des différents
FAI, telles qu'elles sont menées par des
associations de consommateur, ou l'État, ou un
régulateur (comme ce que fait
l'ARCEP avec son Observatoire sur la qualité du service fixe d'accès à l'Internet). Ces mesures peuvent être faites à des fins de
comparaison, mais aussi de diagnostic. La référence normalisée en matière de
métrologie est évidemment composée des RFC du groupe ippm (hélas non
cités dans le rapport ARCEP mentionné plus haut). Ces RFC définissent les métriques essentielles comme le temps
d'acheminement d'un paquet (RFC 2679) ou comme la
capacité (RFC 5136). Comme la valeur de ces
métriques dépend du point où se fait la mesure, il fallait pouvoir
exprimer cette information. C'est le but de ce RFC, exprimer
rigoureusement où la mesure a été faite.
Prenons l'exemple d'une sonde
Atlas « pinguant » un amer situé sur un autre continent, par
exemple une ancre Atlas. Le
résultat peut être très différent selon que la sonde soit située chez
M. Michu et connectée avec du WiFi, ou bien
qu'elle soit dans un data
center, toute proche d'un gros point
d'échange. Comment exprimer cette information sur la
localisation de la sonde ? La terminologie utilisée aujourd'hui est
souvent floue. Par exemple, on va dire que la sonde est « située chez
l'utilisateur ». Mais ce n'est pas assez précis. Est-elle directement
sur la box ou bien derrière,
connectée par un réseau WiFi bien surchargé ?
On définit donc un chemin de référence
(reference path) qui est le chemin suivi par les
paquets IP de la mesure. Sur ce chemin se trouvent des
points de mesure (measurement
points) où peuvent être installés les appareils de
mesure. Ces termes viennent de la norme UIT Y.1541,
de la section 5.1 du RFC 3432 et de la section
4 du RFC 5835.
Donc, d'abord (section 3 du RFC), la terminologie essentielle :
- Le chemin de référence (reference
path) est une suite d'équipements
(routeurs, commutateurs,
bornes WiFi...) et de liens qui sont traversés
par les paquets.
- Un abonné (subscriber) est la personne ou
l'organisation qui a loué les services d'un prestataire, peut-être
avec des restrictions sur ce qu'il peut faire (cf. la norme UIT
Q.1741).
- Un composant dédié (dedicated component) est
une ressource (matérielle ou virtuelle) du chemin de référence qui est entièrement dédiée à
un abonné. Un composant partagé est, lui, partagé
entre les abonnés.
- Une démarcation (service
demarcation point) est la frontière où les
responsabilités du prestataire s'arrêtent. Par
exemple, dans le cas d'un accès ADSL typique,
la démarcation est juste avant la
box (côté utilisateur), le
FAI n'étant pas responsable du réseau local à
la maison. Pour un McDo avec WiFi, la
démarcation est les murs du restaurant (les ondes peuvent sortir mais
McDo ne s'engage nullement à ce que le WiFi fonctionne dehors).
- Les segments du chemin de référence peuvent être
gérés ou non-gérés
(managed paths and unmanaged paths). Attention, le
terme est très chargé, car souvent utilisé de manière propagandiste
dans les discussions sur la neutralité du
réseau. Ici, la définition se place du point de vue du
prestataire, par exemple du FAI : est géré ce dont il est responsable,
le reste étant considéré comme non-géré (il faudrait plutôt dire
« géré par quelqu'un d'autre »).
La section 4 donne un exemple typique de chemin de référence : la
machine de l'utilisateur, le réseau local privé de l'utilisateur, une
démarcation avant d'arriver dans le réseau du FAI, l'interconnexion
entre le FAI et son transitaire, éventuellement
plusieurs transitaires, encore une interconnexion avec le FAI du
destinataire, une nouvelle démarcation, qui mène au réseau local privé
du destinataire, puis la machine de destination. Dommage que
traceroute ne montre pas les chemins comme cela
:-) Ces démarcations et interconnexions ne se voient en effet pas
facilement dans les paquets IP et doivent donc être documentées
explicitement lorsqu'on fait des mesures.
La section 5 est ensuite consacrée aux points de mesure. Chacun
doit recevoir un numéro unique, pour permettre de décrire précisement
la mesure, et le RFC propose un schéma de numérotation :
mpXNN
où X est le numéro du réseau (0 chez
l'utilisateur, 9 chez le destinataire, et obligation de changer de
numéro quand on change d'acteur) et NN une machine ou un lien sur le
réseau, avec des numéros croissants quand on s'éloigne de l'utilisateur. Ainsi, on aura, par exemple mp000
pour la
machine de départ chez l'utilisateur (la sonde Atlas dans mon exemple
plus haut), mp120
pour
une mesure faite sur le DSLAM du FAI,
mp200
pour le premier routeur du transitaire, etc. À noter que les contraintes pratiques fait que les points
de mesure ne sont pas forcément placés idéalement. Par exemple, on
voudrait mesurer dans la box mais elle ne le permet
pas et on place alors un point de mesure dans un appareil externe. Ce
n'est pas idéal, par exemple du fait que la connexion entre la box et
cet appareil peut introduire des problèmes.