Aujourd’hui, les grandes entreprises et administrations publiques hésitent entre continuer à utiliser des logiciels propriétaires ou basculer vers les Logiciels Libres. Pourtant, la plupart des logiciels libres sont capables de bien traiter les données issues des logiciels propriétaire, et parfois avec une meilleur compatibilité.
C’est alors la barrière de la prise en main qui fait peur, et pourtant...
Les logiciels libres
L’aspect « Logiciel Libre » permet une évolution rapide et une plus grande participation des utilisateurs. Les aides et tutoriels foisonnent sur Internet ou sont directement inclus dans le logiciel lui-même.
Enfin, les concepteurs sont plus proches des utilisateurs, ce qui rend les logiciels libres plus agréable à utiliser et conviviaux.
Grâce à la disponibilité des logiciels libres, vous trouverez facilement des services de support techniques et la licence n’est plus un frein à l’utilisation de ces logiciels par votre personnel.
Notre support technique concerne essentiellement les logiciels libres, que ce soit sous forme de services ponctuels ou de tutoriels.
Tout a commencé par une panne d'un
Eurostar. Immobilisé sur la voie, il
bloquait toute la ligne à grande vitesse du nord de
Paris. Mon TGV pour
Lille a eu une heure et demie de retard. En
attendant ce TGV, je pouvais perdre du temps sur des
réseaux sociaux futiles, ou bien lire les
vrais penseurs qui écrivent sur du papier. J'ai donc acheté un
hors-série de la revue Books, « Internet,
pièges et maléfices ». Conseil : n'achetez pas cette revue. Il
faut le faire une fois pour savoir mais, après, on peut
s'abstenir, c'est très mauvais.
Le hors-série est consacré aux problèmes liés à l'Internet, ou
plutôt essentiellement aux GAFA car c'est
presque tout ce que les auteurs connaissent de l'Internet. La
plupart des textes sont de la simple propagande anti-Internet,
style Finkielkraut ou
Joffrin, mais traduits de
l'anglais, et publiés initialement dans des
revues intellectuelles états-uniennes prestigieuses (genre
The New York Review of Books
ou The New Yorker),
avant d'être rassemblés par Books dans ce
hors-série.
Cela peut paraitre bizarre de parler de
« propagande ». Après tout,
l'Internet n'est ni un parti politique, ni
une idéologie. Mais pourtant, la plupart des articles collectés
ici ne sont effectivement pas du niveau de l'argumentaire mais de celui de la
propagande : aucune référence précise, aucune vérification des
faits, aucune mise en perspective. Ainsi, l'inévitable article sur le
darknet ne manque pas de reprendre le cliché classique « tous
les groupes terroristes ont une présence sur Internet » (p. 65), ce qui
est factuellement exact (de même que « tous les terroristes
utilisent une voiture ou le métro » ou bien « tous les terroristes
boivent de l'eau ») mais n'offre aucune information, à l'époque où
tout le monde a une présence sur
Internet.
Books se veut intellectuel donc la propagande est légèrement
plus subtile que sur BFM TV. Ainsi,
l'article sur le darknet
reconnait à mots couverts que le recrutement de tueurs
à gages sur le darknet est une légende urbaine. C'est
un des rares cas où il y a eu un scrupule tardif de l'auteur.
Mais autrement, tous les clichés se succèdent. On y trouve la
traditionnelle bulle de filtres, comme si,
avant Internet, le militant communiste lisait autre chose que
l'Humanité et le patron autre chose que le
Figaro, comme si, au café du commerce, on
ne parlait pas déjà uniquement avec des gens proches, comme si les
intellectuels qui passent à la télé allaient de temps en temps sur
les rondspoints pour parler avec des gilets
jaunes. On y voit le méchant Internet tuer les
artistes car tout est gratuit. Bien sûr, Wikipédia n'est pas
fiable et est trumpiste, puisque prétendant que toutes les vérités
se valent. On y trouve les jeunes qui ne lisent plus,
l'ordiphone qui rend bête, etc. On reconnait
les deux ou trois mêmes personnes qui sont systématiquement cités
dans les articles anti-Internet, Morozov et
Lanier. Notez que je ne les compare pas :
Morozov dit des choses qui font réfléchir, lui. Lanier n'est cité
que parce que la propagande aime bien les repentis.
Bref, rien d'original ou de nouveau, pour une revue qui parait
fin 2018 (certains articles sont des reprises et sont plus
anciens). Question clichés, il ne manque que celui comme quoi les
dirigeants de la Silicon Valley mettraient
leurs enfants dans des écoles sans ordinateurs.
Critiquer Internet est chic dans certains cercles
intellectuels, aux États-Unis comme en France. Par contre,
critiquer le capitalisme est tabou : pas
question de dire que Google est une entreprise capitaliste, et que
cela explique mieux son comportement que de fumeuses références au
transhumanisme. Critiquer le capitalisme,
ou même simplement l'appeler par son nom, vous fait tout de suite
classer chez les affreux communistes. Il faut donc prendre les
devants et plusieurs articles de la revue mentionnent les pays de
l'ex-URSS, notamment la
Biélorussie, en décrivant l'horreur des
régimes staliniens, pour bien enfoncer le clou « nous attaquons
l'Internet mais nous n'attaquons pas le capitalisme, nous ne
sommes pas des communistes, rassurez-vous ». Seul l'interview de
Chris Hedges (par ailleurs très réactionnaire) nomme simplement
les choses, en disant que Facebook et Google agissent comme ils
agissent parce que ce sont des entreprises capitalistes.
Et, pour les lecteurs paresseux qui, contrairement à moi,
n'auraient pas lu tous les articles, l'introduction anonyme
fournit une synthèse toute faite « Books a été parmi les tout
premiers organes de presse à attirer l'attention sur les risques
que le développement d'Internet fait peser sur les démocraties ».
Tous les articles de ce numéro ne sont pas aussi caricaturaux
que ceux que j'ai résumés ici. L'article de Frank
Furedi sur la surinformation est une bonne synthèse
historique. L'auteur y fait bien remarquer qu'à chaque saut
technologique (notamment l'écriture et
l'imprimerie), les contemporains ont eu peur
de cet « excès d'information ». Et il analyse à juste titre que
cette peur vient du fait qu'on n'a pas tout de suite les outils
(techniques et intellectuels) pour gérer cet afflux d'information
rendu possible par la nouvelle technique. De même, James
Gleick sur les Anonymous, et Ben Jackson
sur le harcèlement ont fait de bons articles qui ne sont pas
unilatéraux dans leurs conclusions.
Mais cela ne devait pas plaire à la rédaction : les articles
exprimant un point de vue nuancé sont systématiquement dotés
d'encadrés qui les contredisent. (Une belle violation du
droit moral, à mon avis, que ces pavés
placés au milieu de l'article d'un auteur et qui prennent le
contrepied de l'article !) Et, alors que les articles sont signés,
ces encadrés sont anonymes (juste signés « Books »). Frank Furedi
a même droit à deux encadrés.
La passion du propagandiste va jusqu'à accompagner l'article
d'Edward Luttwak consacré à Edward Snowden
d'un texte (p. 39) qui affirme que Snowden est lié à la Russie et en
donnant pour preuve le fait qu'il encourage à utiliser
Tor (stupidement qualifié de « moteur de
recherche ») ajoutant que Tor est financé par la Russie ! Dans le
monde réel, Tor est financé par l'armée états-unienne, ce que dit
d'ailleurs bien un autre article (p. 62). Mais personne ne fait de
vérification chez Books. On voit donc que les mensonges à des fins de propagande ne
sont pas une exclusivité de RT.
La rédaction ne s'est pas acharnée uniquement à coups
d'encadrés dans les articles qui ne convenaient pas au discours
souhaité. Elle a aussi utilisé les chapeaux. Ainsi dans un article sur
le darknet, le chapeau affirme que Bitcoin est
« intraçable », alors que l'article, p. 64, explique à juste titre
que c'est le contraire (à propos de l'enquête Silk road).
Autre malhonnêteté intellectuelle utilisée dans cette revue,
c'est l'allusion. Au contraire des mensonges francs et clairs (le
financement de Tor par la Russie…), l'allusion n'affirme rien de
précis, mais laisse entendre. Ainsi, p. 63, le Bitcoin est
critiqué car ne reposant pas sur l'or ou l'argent (ce qui est
exact, mais est également vrai de toutes les autres monnaies), et
laisse entendre que les monnaies fiat (celles des États),
elles, le seraient.
Enfin, la revue use largement de formules jolies mais ne
reposant pas sur des faits précis et vérifiables. On lit par
exemple que Bitcoin repose sur une « formule mathématique
obscure ». On joue ici sur l'aversion des médias pour la
mathématique, présentée comme difficile et
obscure, pour éviter que les citoyens ne se penchent sur les
questions compliquées, afin de laisse entendre qu'il y aurait un
secret caché dans Bitcoin. Ce n'est pas le cas, le logiciel est
libre, on peut
vérifier qu'il utilise de la cryptographie
classique et bien connue. Certaines
cryptomonnaies comme
Monero ou Zcash
utilisent en effet des algorithmes cryptographiques moins connus
et difficiles à appréhender, mais, comme pour le Bitcoin, ils
n'ont rien d'obscur et sont largement documentés. Mais l'effet
visé était purement rhétorique : « obscur » (comme le
dark de darknet) fait peur.